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Channel: Happygay - Blog d'un homo manceau
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Tu n'aimeras point

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Non, non, non. Tout va bien, ce n'est pas encore un coup tordu de notre gouvernement chéri. C'est simplement le titre du film d'Haim Tabakman que j'ai eu le privilège de voir hier soir avant sa sortie en salle le 2 septembre aux cinéma MK2 quai de Loire à Paris. Une parenthèse éclaire mais sincère pour remercier Yagg de m'avoir permis, ainsi que d'autres membres de la communauté, à assister à cette projection.

Alors évidemment, on est loin, très loin des block-busters en 3D qui sont à l'affiche des grosses machineries cinématographiques. Et c'est tant mieux. Ce film traite de l'homosexualité au sein de la communauté juive orthodoxe très croyante (pas de télévision, etc.) de Jérusalem au travers des deux personnages principaux. Le premier, un père de famille de trois enfants, qui reprend la boucherie cachère familiale de son père tout juste décédé. Le second, par un jeune-homme (très charmant au demeurant) qui se rend à Jérusalem pour tenter de retrouver un amant de son age qui étudie dans ce quartier. Et c'est sous une pluie battante devant la boucherie que les deux hommes font connaissance et qu'une relation, d'abord professionnelle, puis amicale et finalement amoureuse se dessine. L'action se passe sur fond de réflexions théologiques autour du rabbin, de groupes de prières, et de réflexions personnelles, montrant côté pile une religion qui se revendique humaine, aimante ("tu aimeras ton prochain comme toi-même"étant la base même de la Thora) et tolérante en ce qui concerne les épreuves à surmonter pour gagner sa place au royaume des cieux (un premier échec à une épreuve sera oubliée si l'épreuve suivante est remportée). Côté face, c'est bien entendu les contradictions qui s'affichent, toute la jouissance de vivre que peuvent tirer ces deux hommes de leur rencontre, leur amour, la tolérance revendiquée sont balayés d'un revers de main pour laisser place au mépris, à la calomnie et à la destruction coute que coute de cet amour. Destruction qui ira, hélas, jusqu'à la mort, la vraie, là ou le personnage du boucher indiquait au rabbin que cette rencontre il permettait enfin d'accéder à la vie. Ce qui lui vaudra une gifle comme seule réponse.

Ce film reste toutefois difficile d'approche, même s'il mérite franchement qu'on s'y intéresse. D'une part par son rythme lent, la bande originale très oppressante, et l'atmosphère du décor très dépouillé qui font qu'on a du mal à s'identifier à la fois aux situations et aux acteurs. Question de culture toutefois je pense, n'étant pas coutumiers des références juives orthodoxes dans l'hexagone. J'ai personnellement eu quelques difficultés à croire aux situations où je me serais attendu à davantage de violence dans les mots et dans les actes. Tout reste relativement feutré, comme dans une des scènes à la fin du film où le quartier entier est au courant des rapports entretenus entre les deux hommes et où la femme du boucher échange très peu sur cet événement pour le moins inhabituel qui menace directement sa famille, un peu comme s'il s'agissait finalement de quelque chose de très banal. J'ai en revanche beaucoup apprécié que le réalisateur prenne des positions plutôt tranchée dans le jeu des acteurs, ne se limitant pas, par exemple, à seulement suggérer l'homosexualité des deux hommes mais au contraire à la montrer de façon claire, et en particulier pour ce qui concerne les rapports physiques explicites.

Bref, un joli film qui traite sans pudeur, avec honnêteté et sincérité de l'hypocrisie dès lors qu'il s'agit de se cacher derrière l'interprétation des textes saints, de les interpréter à bon compte pour faire valoir ses pulsions homophobes personnelles les plus profondes.

Pour un aperçu du film, voici la bande annonce.

Merci également à Brice de m'avoir accompagné.


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